De Marseille à Tuktoyaktuk

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De Marseille à Tuktoyaktuk- [14/30] : 

Le mercredi vers 17 heures, Omar et Véro se rendent à l’église désaffectée Glad Tidings qui se trouve derrière l’Association francophone. C’est là que se déroule l’atelier d’écriture créative conduit par Jean-Pierre. Ils sont quinze dont Ange, Victor, Rosalie, et Pascaline de l’Association. Ils sont de bonne humeur, ils se connaissent tous. Ils plaisantent autour de gâteaux, de fruits, de jus et de bière. Parmi eux un homme aux traits maghrébins, « il doit avoir mon âge » pense Omar. L’homme s’approche de lui en français « tu es Algérien ? » L’homme se nomme Razi. Il dit être de passage. Puis il dit être en vacances. « En fait je dois bientôt me rendre à Stockholm ». Il est confus. Omar ne saisit pas tout ce qu’il lui dit. Quelques mots sont échangés en derja. Il est question de sa fille, de la fuite du temps, d’un accident… Razi est arrivé dans les territoires il y a quelques semaines. Leur discussion est interrompue par Jean-Pierre qui demande l’attention de chacun. « Je vais vous lire un poème d’Émile Nelligan, soyez très attentifs. Je vous donnerai ensuite la consigne d’écriture. N’écrivez pas, écoutez bien : 

‘‘Ce fut un grand Vaisseau taillé dans l’or massif:/ Ses mâts touchaient l’azur, sur des mers inconnues ;/ La Cyprine d’amour, cheveux épars, chairs nues,/ S’étalait à sa proue, au soleil excessif…’’

Puis il leur distribue « Le vaisseau d’or », lit la première consigne, et d’autres… Il a clos la première partie de l’atelier par la présentation de l’auteur, de sa vie tragique qui se reflète dans sa poésie. Un bon moment qu’ils espèrent renouveler.  

Le vendredi 15 juillet, vers sept heures du matin, les Marseillais entament l’autre partie du voyage, celle qui les conduira vers le Cercle polaire, Inuvik et sa mosquée. La veille, par précaution – « méfiez-vous des distances » les avait-on prévenus – ils ont acheté et rempli trois jerrycans de carburant. À la sortie de Yellowknife, un doute soudain traverse l’esprit de Omar qui se confie à Véro. « Personne ne connaît cette histoire de mosquée des Inuits. Et si elle n’était qu’une blague, un poisson péché en avril et réchauffé en été ? » « Comment est-ce possible, alors que des articles de journaux en ont parlé comme d’une réalité concrète ? Elle existe bel et bien ! » lui rétorque Véro quelque peu irritée. Omar le sait bien évidemment. Plusieurs journaux ont rapporté en effet dans le détail les aventures vécues par les transporteurs routiers de cette mosquée. C’est un préfabriqué de cent quarante-cinq mètres carrés, de style totalement canadien. Il a voyagé durant 4500 kilomètres, pendant un mois, de Winnipeg à Inuvik. La mosquée a failli à plusieurs fois se renverser n’étaient l’expertise et la hardiesse des camionneurs. Pour prévenir tout risque, de longs tronçons de route ont été entièrement interdits à la circulation des journées entières. La largeur de l’ensemble, maison et l’engin transporteur, était telle que le chauffeur ne pouvait faire autrement qu’occuper les deux voies de la route. 

Ils ne sont pas bien loin de Rae Edzo, un village Déné. Les distances entre les villes sont grandes. Omar dit qu’elles lui font penser à celles qui relient entre elles les villes du Sahara : Timimoun – In-Guezzam, Tindouf – Djanet, Tndouf – el-Oued… De Yellowknife à Fort-Providence, la route est longue de 300 kilomètres. Nommée Yellowknife Highway, elle n’est pas asphaltée, mais praticable et bien entretenue. La circulation est très faible. Par contre lorsqu’un véhicule croise ou double le Westfalia, celui-ci est aussitôt entièrement recouvert de poussière. Ils s’arrêteront au village indien. D’énormes bisons remontent dans l’autre sens. Ils avancent tantôt sur le bas-côté, tantôt sur la route.

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