De Marseille à Tuktoyaktuk

De Marseille à Tuktoyaktuk- [28/30] : 

De nombreuses personnes s’étaient déplacées lors de l’arrivée de la mosquée à Inuvik, et tous les musulmans dont le métier le plus partagé était « chauffeur de taxi ». Ce jour-là évidemment et par conséquent la ville avait souffert de cette soudaine et totale absence. Cela ressemblait à une grève. Aucun taxi n’était disponible. Le minaret de “la petite mosquée de la toundra” – autre appellation donnée à la mosquée, celle-là par des journalistes –a été construit localement, c’est-à-dire à Inuvik. L’ouverture au public de la mosquée la plus septentrionale au monde a eu lieu le 10 novembre dernier, peu avant l’Aïd el-Kébir, en présence de nombreuses personnalités locales, dont le maire d’Inuvik. On a prié, puis un dîner a été offert aux habitants pour célébrer l’inauguration. Le repas a réuni près de trois cents personnes. « Après on a dansé tous ensemble ! », dit Dehgah. Il demande, les yeux grands ouverts, « y’re muslim ? » 

Les horloges s’apprêtent à basculer alors que le soleil de minuit se prête volontiers à toutes sortes de prises photographiques. Véro le mitraille, ainsi que des gobemouches piaillant de joie sur une branche de mélèze fatigué devant chez Marys Room à l’angle de la Third avenue et de Harper Street. Il fait à peine sombre. C’est à cet endroit que les Marseillais se séparent des deux amis autochtones non sans avoir échangé leurs coordonnées. « See you soon ! » 

Ils quittent Dawson pour s’installer à la sortie nord de la ville dans le Klondike River Lodge, à une quinzaine de kilomètres. Les lieux abritent bien une station-service. Ils peuvent souffler. Le Bonanza gold motel se situe au pied de la mythique Dempster Highway qui mène à Inuvik la ville de destination. Ils récupèrent la clé de la chambre et concèdent qu’il leur faut, après la douche, s’étendre confortablement et rêver d’Inuvik, de sa mosquée, de son église-igloo, des grizzlys, rêver de Tuktoyaktuk et des caves glacées de la mère Ninguiukusuk, pourquoi pas ? 

La nuit n’a pas duré. A-t-elle seulement pointé le bout du nez ? Il suffit au soleil de tourner sur lui-même au raz de la mer de Beaufort et réapparaître pour égayer un nouveau jour. La nuit a duré le temps d’une café. Véro et Omar ont dormi en utilisant le masque sommeil qu’on leur a distribué dans l’avion. Le réveil sonne à l’heure programmée. Ils sont extirpés du lit par une luminosité aveuglante. Omar a ronflé une partie de la nuit. Lorsque Véro le lui dit, il feint l’étonnement « ah oui ? » Mais ils se connaissent trop bien. 

Le soleil brille haut dans un ciel parfait. Ils ont hâte d’entamer la Dempster qui commence ici même devant ce motel où ils prennent un café et du jus de fruits accompagnés de biscuits canadiens au sirop d’érable et de muffins au chocolat. À la station ils font le plein de diesel. Les trois jerrycans de vingt litres dans le coffre sont remplis. Ils leur seront peut-être utiles à mi-chemin, vers Eagle Plains. Omar paie et revient vers le véhicule. Les voilà prêts pour le dernier tronçon du voyage. Omar dit qu’ils atteindront Inuvik en fin de journée. Mais ils émettent aussi l’éventualité de bivouaquer à mi-route. Pourquoi pas ? Ils rentreront alors dans Inuvik le samedi 23. 

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