De Marseille à Tuktoyaktuk

De Marseille à Tuktoyaktuk- [18/30] : Véro et Omar reprennent la route, contents d’avoir fait le plein. Ils roulent pendant une heure avant un nouvel arrêt à Blackstone Territorial Park qui fait face aux montagnes des Rocheuses et au Parc national Nahanni Butte, inscrit au patrimoine mondial. La vue vers Nahanni Butte est des plus saisissantes. La photographe s’en donne à cœur joie. Le parc contient un espace camping gratuit et autres commodités. Les moustiques, par centaines, tournoient comme s’ils étaient déréglés. Aucun salut n’est possible.

La journée décline lentement bien que la lumière demeure intense. La forêt partout imprime sa forte présence. Elle forme un gigantesque plateau vert. De temps à autre elle dégorge un abri, une maison avec son garage, son jardin ouvert, ou un ours, un bison, pour impressionner le touriste, le routier. Véro et Omar sont à près de mille kilomètres à l’ouest de Yellowknife. Ils parcoururent des centaines de kilomètres de mauvaise route depuis Fort-Providence. Route non goudronnée et sur laquelle on ne peut rouler à plus de soixante à l’heure et parfois même quarante, car les dos-d’âne et les nids de poule, les ‘‘bump’’, ainsi que les travaux y sont nombreux. Alors, Inuvik et sa « Midnight Sun Mosque » (latitude 68°.36’ N) et Tuktoyaktuk (69°.44’ N), toutes deux situées au-delà du cercle arctique, ce n’est pas pour demain !

Il leur faut une sacrée dose de patience pour arriver vers 20 h à Fort Liard. Le petit village, indien comme le précédent, porte le même nom que la rivière, la Liard, qui longe son flan. Il est tout en longueur. Il se trouve à trente km au nord de la Colombie Britannique. Le village compte officiellement un demi-millier d’habitants. Les Dénés vivent dans cette région depuis 10.000 ans lit-on dans les prospectus. Ils chassaient, trappaient, pêchaient. Là aussi les habitations sont toutes des maisons individuelles en bois. Chaque résident possède son propre espace avec beaucoup de carrés gazonnés. Dans le jardin de certaines de ces maisons, d’étranges petits rectangles ornés de croix sont aménagés, et sur lesquels des objets sont posés. Les Marseillais jureraient que ce sont là des sépultures. Un jeune pêcheur arrive vers eux. Il met bien en avant sa belle prise de plus de cinquante centimètres, peut-être un grand brochet, mais ils n’en sont pas sûrs, tandis que Véro le prend en photo. Le jeune homme leur donna le nom local de la capture, mais ils ne le retinrent pas. Le jour ne semble pas vouloir tomber à 21h30 alors qu’ils sont bien bas de la carte du pays, à la frontière de la Colombie Britannique et du Golfe d’Alaska. Épuisés ils passent la nuit dans les sous-bois, à quelques dizaines de mètres du General Store and Motel qu’ils évitent à cause du prix prohibitif pratiqué. Ils auraient bien volontiers pris un bain chaud. Mais à près de deux cents dollars la chambre, ils n’y pensent même pas. Si parfois ils préfèrent dormir dans un motel, dans un hôtel ou dans un camping c’est avant tout pour l’utilisation des douches, plus agréables à prendre que dans le camping-car. Ici ils les auraient chèrement payées. Omar a ronflé plusieurs fois durant la nuit. « C’est vrai ? » fait-il, vexé, lorsque Véro le lui fait remarquer. Elle ajoute « j’ai sifflé, lmais tu n’as rien entendu ». Ils déjeunent dans le Westfalia avant de se rendre au Centre artisanal Acho Dene Native Crafts, où ils achètent deux paniers d’écorce de bouleau joliment décorés, entièrement faits à la main. Véro prend aussi un pendentif qui ressemble étrangement à une amulette « that’s not » lui dit la vendeuse en riant. Dans la supérette qui jouxte le motel, ils ne trouvent rien d’intéressant à acheter. Ailleurs, à part le General Store and Motel, le village est comme anesthésié. Comme la veille, il est désert et rien n’indique que c’est un jour de fin de semaine. Ils quittent les lieux vers onze heures. Trente-cinq kilomètres plus tard, ils franchissent la frontière interne et se retrouvent en Colombie-Britannique où spontanément apparaît une route goudronnée enfin ! Une route qui porte le même nom que celle qui les éreinta la veille, la Liard Highway. 

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