« Culture club » c’est fini

J’apprends que l’émission hebdomadaire sur Canal Algérie « Culture club » est définitivement arrêtée. La censure est exécrable. Je comprends bien ce tollé naissant à la suite de la suppression de l’émission « Culture Club », je l’entends bien. Au pays de l’aveugle le borgne est roi. Je veux dire que les émissions culturelles sont rares dans la sphère médiatique algérienne, si l’on met de côté la chanson et le bendir. Et dans ce désert culturel, Culture club apparaissait comme une lumière, ce qu’elle n’était pas du tout. Disons qu’elle barbotait dans une marre. Il reste néanmoins que sa « liquidation » est à dénoncer. Je ne connais pas les dessous de cette suppression et ce qui est prévu pour remplacer l’émission, si tant est qu’on ait prévu quoi que ce soit. Mais je peux néanmoins écrire qu’à part quelques rares moments d’exception, ça ronronnait en rond dans « Culture Club arobase point com ». On n’a jamais entendu quelque réflexion que ce soit d’un téléspectateur, très sollicité par ailleurs, via le ridicule « vos questions, vos réactions ». Je n’ai jamais entendu un point de vue, ou une question d’un téléspectateur alors qu’il est sans cesse sollicité « n’oubliez-pas ‘culture club arobase point com’ » disais-je. Ça ronronnait et ça se léchait en famille. Je t’embrasse, tu m’embrasses, on connaît la chanson. Ça sentait souvent le détestable copinage.Toujours les mêmes poncifs, les mêmes phrases stéréotypées, les mêmes arguties. Toujours rester lisse, caresser ou pourfendre dans le sens du poil, aucun débordement non autorisé. La peur donc. Toujours les mêmes salamalecs, peu de profondeur, peu de recherche, peu de réflexion sur l’art, la littérature…. Les mots galvaudés, dénués de sens sont repris, étalés pour épater comme on étale le peu de confiture qu’on possède pour montrer aux voisins qu’on en possède de la confiture (culture). «Nos agitateurs », agitateurs dans un bocal ou un verre de thé peut-être. La parole donnée à l’invité, lui était vite reprise par le présentateur qui adorait s’entendre parler en remuant ses yeux et sa grosse gourmette en or (ou argent) « n’oubliez pas arobase entv point dz » qu’il répétait ainsi que d’autres termes-tics à en devenir malade. Toujours (ou presque) les mêmes troncs qui circulent en rond depuis des années. Où Kateb Yacine, Mimouni, Djaout, Martinez et d’autres monopolisaient, à leur corps défendant, l’essentiel du temps alors que les jeunes espoirs, parfois brillants, sont abandonnés à eux-mêmes. Et il y en a pourtant à la pelle dans les trois langues, j’en ai rencontré. Alors que des sommités (algériennes bien sûr) de la littérature francophone, saluées dans le monde entier, étaient reniées. Ordre politique: Boualem Sansal, Kamel Daoud, Salim Bachi, Maïssa Bey… Ah, Culture club, la facilité et le copinage très souvent. Je t’invite, tu m’invites…. Mais, hélas, hada ma halbet. Je préférais de loin, de très loin, l’émission de Youcef Saïeh « Expression Livres » qui, sans se la péter (désolé), nous persuadait qu’il en savait quelque chose du titre en question dans l’émission, qu’il avait lu de fond en comble le livre de l’invité. C’est vrai qu’il parlait beaucoup aussi, mais pas dans le vide, il ne soufflait pas du vent pour le vent. Et il posait de nombreuses questions à l’invité, le poussait pour en dire toujours plus sur ses écrits. Tel est mon point de vue.

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LE SOIR D’ALGERIE:

La scène artistique indignée

Suppression de l’émission «Culture club» 

Publié par Sarah Haidar  – le 03.10.2020 , 11h00

C’était l’un des rares programmes culturels de Canal Algérie et rien que par son existence, l’émission « Culture Club » faisait beaucoup d’heureux parmi l’audimat d’une télévision publique exsangue. 
Présentée par Karim Amiti, l’émission culturelle hebdomadaire « Culture Club » n’est plus. Les raisons de la suppression des programmes de la grille de Canal Algérie ne sont pas explicitées, mais il s’agirait, selon nombre d’acteurs du domaine, de censure. 
Écrivains, musiciens, plasticiens, femmes et hommes de théâtre, ou encore cinéastes et comédiens, « Culture Club » invitait chaque semaine un groupe d’artistes et auteurs pour discuter de leurs œuvres. En effet, tout dans le contexte actuel marqué par la lutte contre la diversité d’idées et le débat contradictoire laisse penser que l’émission où des invités de tous horizons et de tous bords idéologiques venaient s’exprimer a été censurée. La suppression « définitive » de cette émission a suscité une vague d’indignation au sein du milieu artistique et littéraire où de nombreux acteurs ont dénoncé ce qu’ils considèrent comme de la censure. L’écrivaine Amina Mekahli rend hommage au « professionnalisme, l’humanisme et l’humilité » avec lesquels Karim Amiti « a œuvré au rayonnement de la littérature et de la culture algériennes ». Et de conclure : « Ils peuvent arrêter une émission mais jamais ils ne pourront arrêter la passion qui l’anime .» Le professeur d’arts dramatiques Habib Boukhelifa  dénonce « le retour de la pensée unique et de la chape de plomb » et regrette « une émission phare que les Algériens adorent ». La metteure en scène Hamida Aït el Hadj, pour sa part, crie « au secours, la guillotine est sortie du musée » et déplore la mort d’une émission que «tous attendaient : les artistes, les écrivains, les plasticiens » et tous ceux qui « croyaient en une renaissance de la culture algérienne ». Tout aussi affligé, le pédagogue et ancien conseiller au ministère de l’Education nationale Ahmed Tessa parle d’une « mort en direct » et regrette « la rare, pour ne pas dire la seule bouffée d’oxygène dans le champ télévisuel algérien. Toutes mes condoléances aux amis de la culture, aux écrivains, artistes, universitaires et auteurs  suite à ce décès programmé de la culture ». Raja Alloula, la présidente de la Fondation Alloula et veuve du défunt metteur en scène, se dit, quant à elle, « ahurie et stupéfaite par l’arrêt de l’émission qui, depuis des années, nous réconcilie avec la télévision algérienne. Une émission où la création est mise à nu, où la riche discussion va dans les profondeurs de la création, où un animateur pose les questions qu’il faut pour la connaissance d’une œuvre artistique. En retour, le riche débat qui s’ensuit nous pousse à lire, à acheter des ouvrages pour enrichir notre bibliothèque (pour ceux qui en ont une). L’animateur de cette émission est, progressivement, devenu notre ami, celui qui nous révèle depuis des années les méandres de l’univers des artistes. C’est ainsi que nous faisons souvent connaissance avec des noms de notre culture qu’aucun autre espace télévisé ne présente ». 
Un autre son de cloche, beaucoup moins consensuel et néanmoins intéressant, vient de l’auteur et universitaire Ahmed Hanifi qui publie sur son blog un texte où il commence par dénoncer la « liquidation » de « Culture Club » mais exprime un avis tranché sur cette émission où « à part quelques rares moments d’exception, ça ronronnait en rond. (…) Ça sentait souvent le détestable copinage. Toujours les mêmes poncifs, les mêmes phrases stéréotypées, les mêmes arguties. Toujours rester lisse, caresser ou pourfendre dans le sens du poil, aucun débordement non autorisé. La peur donc. Toujours les mêmes salamalecs, peu de profondeur, peu de recherche, peu de réflexion sur l’art, la littérature…. Les mots galvaudés, dénués de sens sont repris, étalés (…) »
S. H.

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