« Hayy ben Yaqdhân » d’Ibn Thufaïl

« Hayy ben Yaqdhân » d’Ibn Thufaïl- vendredi 1.12.2023- 5/18

Ibn Thufaïl n’utilise le nom ‘‘Hayy’’que peu de fois (28 pour tout le roman), préférant les pronoms personnels (lui ou il, là même où Quatremère écrit le prénom). Le nom du fils de la gazelle apparaît pour la première fois à la fin de l’introduction. 

1_ Le préambule

Ibn Thufaïl commence par un long et explicite préambule convoquant El Halladj, Al Khawarizmi, Al Ghazali, Al Farâbi (Abou Nasr), Ibn Sina (Abou Ali) ainsi qu’Ibn Bajja (Ben es Saigh) qu’un voyage à Oran a perturbé, générant en lui un dérangement l’empêchant d’expliquer correctement « l’intuition extatique » raille Ibn Tufayl. Une longue introduction où il reprend des versets du Coran, détaille les états spéculatifs inaboutis et ceux « qui sont arrivés à la phase de la familiarité » (avec Dieu), avant de lui proposer une « histoire allégorique de Hayy ben Yaqdhân » cœur de notre propos. Dans cette rissala, le prénom « Hayy » apparaît d’abord en titre, à la fin de l’introduction, puis 27 fois dans le dernier quart du roman. Avant de dérouler l’histoire de Hayy ben Yaqdhân, Ibn Thufaïl explique son origine. D’où vient-il ? Deux versions existent. Ibn Thufaïl expédie la première en quelques lignes pour profondément détailler la seconde qu’il privilégie.

2_ L’origine de Hayy ben Yaqdhân

La première version de l’origine de Hayy est d’ordre anthropologique. Les Anciens, écrit Ibn Tufayl, rapportent que dans une île déserte (on a écrit qu’il s’agit probablement de Ceylan/ Sri Lanka) située dans l’Océan indien (El-Bahr el-akhdar), jouissant « d’une température la plus égale et parfaite qui soit… un nouveau-né, mâle, a été découvert. Il a été déposé sur les eaux à partir d’une île voisine, « importante, vaste, riche et populeuse » dirigée par un roi « d’un caractère hautain et jaloux ». Ce roi empêchait sa sœur de se marier. « Il écartait tous les prétendants ». Lorsqu’elle décida de se marier, elle le fit secrètement en suivant les règles religieuses. Elle épousa son voisin sans que le prince le sache. Lorsqu’elle eut un enfant de ce voisin, nommé Yaqdhân, elle n’en dit rien à son terrible frère. Elle déposa son nourrisson dans « un coffre soigneusement fermé et le livra aux flots » qui le poussèrent jusqu’à la rive de l’île déserte située en face.

La seconde version s’appuie sur d’autres Anciens, en désaccord avec les précédents. Ils avancent que cet être humain est né sans parents, du sein de l’argile en fermentation. » C’est ce que l’auteur appelle « la génération (ou reproduction) spontanée » désignée par une théorie scientifique par le vocable abiogenèse. L’argile en fermentation donne naissance à des globules « du genre de celles que produit l’ébullition » à laquelle se joint « l’âme qui émane de mon Seigneur », âme qu’Ibn Thofaïl compare à « la lumière du soleil qui sans cesse est répandue sur le monde en abondance. » Léon Gauthier trouve que « cette magistrale comparaison est particulièrement poussée. » La description d’Ibn Thofaïl est en effet très approfondie et ardue. 

La lumière et l’âme dans une même optique. Cette lumière se répand sur le monde par le biais de la matière (ou corps, el-jamādāte, el-ajsām). Certaines la réfléchissent au plus haut point, d’autres partiellement et il y a celles qui ne la reflètent pas du tout. « Les corps polis dépourvus d’opacité », comme l’air, ne la réfléchissent pas du tout. « Les corps opaques non polis » qui sont de différentes couleurs, la répercutent partiellement, « les corps polis » (comme les miroirs) la reflètent très bien. 

(à suivre)

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