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Mon SILA au jour le jour : Jour de l’ouverture officielle

LES PHOTOS SE TROUVENT À LA SUITE DU TEXTE

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Mon SILA au jour le jour : Jour de l’ouverture officielle

Nous sommes jeudi 24 mars 2022. Aujourd’hui est le Jour J, ou D Day si vous préférez.

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On peut dire ici que le jour se lève non du fait de la luminosité qui pointe, de la terre qui tourne etc, ou du chant du coq (ah, « le chant du coq » ! qui se souvient de Leïla Boutaleb hein ? elle nous baratinait elle aussi, peut-être forcée), le jour se lève du fait des premiers bruits humains directs ou indirects : cris, klaxons… 7 heures. Tiens, pas d’eau chaude au cœur d’Alger à 7 heures. Trente minutes plus tard, je me suis rendu au salon de l’hôtel pour le petit déj.

Sur la route de la station de métro « Boumendjel » j’ai acheté El Watan et Liberté. Depuis que je viens à Alger (des années), je n’ai jamais pu acheter Le Quotidien d’Oran. Il n’y est pas distribué. C’est dingue ça pour le plus grand (ou l’un des plus grands) tirage de la presse francophone du pays. J’ai donc acheté la presse avant de prendre le métro, direction le Salon du livre (descendre à la station Les fusillés/ El maâdoumine, puis prendre le tram direction Dergana et descendre à la station « Palais des expositions »). 

J’ai parcouru les deux journaux. En page 2 de Liberté j’ai lu et relu un excellent article intitulé « Zemmour n’est pas une exclusivité française ». Le titre est quelque peu racoleur. Le texte traite essentiellement de l’attitude (j’allais écrire « la nature ») d’une grosse, très grosse majorité des Algériens à l’intolérance. L’article est argumenté et j’y adhère totalement (hormis quelques erreurs telles pour « se marier avec une non musulmane ? il faut se convertir », ou « nous sommes souvent racistes… même entre deux frères ou sœurs », et lorsque l’auteur (au fait il s’agit de Kamel Daoud, un nom qui bouscule, qui irrite, qui fait hérisser les cheveux, mais qui souvent dit vrai) et lorsque l’auteur disais-je dénonce avec des pincettes « le procès juste » néanmoins fait à l’Occident. Il aurait pu enfoncer le clou. Bref le reste est un régal. Écoutez ou plutôt lisez cet extrait composé de deux phrases, deux : « Peu à peu, à cause d’une école sinistrée, du manque de voyages et de rencontres, de la faillite de l’altérité, de la mainmise des féodalités sur les mentalités, d’un retour au Moyen-Âge au nom de la religion, de l’enfermement sur soi et de l’obsession des frontières, de la Religion du dé-colonial permanent, quelque chose de maladif a pris le dessus sur l’Algérie d’autrefois. Pour certains, aujourd’hui, l’Algérie, c’est pour les Algériens dans la pureté religieuse, révolutionnaire, familiale, de vertu ou d’ascendance : le reste de l’humanité est constitué de gens trop pauvres pour être intéressants, ou de colonisateurs prédateurs même s’ils sont Danois ou Sibériens, et il faut les incriminer même pour nos poubelles qui débordent dans nos rues. » C’est chaud et remuant. Mais telle est la réalité des Algériens. Il suffit d’un miroir que la majorité refuse de regarder. Le regard porté sur les noirs, condescendant et raciste, je l’ai observé plusieurs fois à Oran. Des comportements qui perturbent notre humanité (« nous sommes musulmans ! »). Et après on crie au racisme des Européens (bien réel cependant), mais regardons-nous bon sang, regardons-nous dans un lisse miroir ! !

J’ai continué de feuilleter le journal lorsque je suis tombé sur les pages centrales, consacrées au SILA. Un encart est réservé à la quatrième de couverture de mon recueil « Poèmes inédits » y compris le texte de cette même quatrième. Une belle surprise.  

Je descends à la station « Palais des expositions » du tram. On entre par le parking. 300 mètres de marche ai-je entendu. Légère brise et soleil bien timide en cette heure, 8h50. Quelques dizaines de personnes avancent, accrochées pour la plupart à leurs téléphones. Des employés semblent quelque peu perdus, « c’est par ici », un autre  « c’est par là ». Et nous, nous suivons les consignes. En fait de 300 mètres se furent deux kilomètres. Une centaine de personnes se bousculent poliment aux guichets. « Je suis auteur, s’il vous plaît, est-ce que… » Inutile de poursuivre m’a répondu l’agent en faction. « Changez de chaîne, allez là-bas chercher un badge ». On lit sur les vitres des guichets « Accord », « Casbah », « Ahaggar »… Des noms improbables. Impossible d’avoir quelque laissez-passer. Le flux des véhicules était incessant, orienté par les intempestifs coups de sifflets d’agents de la sécurité ou de police.

Les gens qui n’ont pas accès au Salon, qui ne sont ni exposants, ni gestionnaires, ni grosses légumes, ni « employés du manège » ( ?) étaient contraints d’attendre. Ils observaient le remue-ménage ou bien s’asseyaient sur les rebords des trottoirs.

Un agent de police s’est approché du petit groupe de jeunes filles assises à mes côtés. Il était 10 heures 05. Il leur a demandé si elles étaient « employées ici », puis il a ajouté qu’il était « inutile d’attendre si vous n’êtes pas invitées ou employées ici. Vous attendez pour rien. L’ouverture au public c’est demain. » L’agent ne m’a rien demandé alors qu’il a vu que je le lorgnais du coin de l’œil et de l’oreille. Sur ce, j’ai quitté les lieux par le bas. Nous étions alors devant l’entrée officielle du Palais des expositions. Au bout de la route, un véhicule de police avec quatre policiers. L’un d’eux m’a renseigné. « Non, il n’y a pas de station de transport par ce côté-ci à moins de marcher une demie heure ». En face nous avons vue sur la grande mosquée d’Alger qu’on n’hésite pas avec fierté de qualifier « la plus grande mosquée d’Afrique et la troisième plus grande mosquée du monde. » D’autres n’hésiteraient pas à protester « on aurait pu construire une dizaine d’hôpitaux avec l’argent englouti là-dedans ! » J’ai entendu les deux expressions, justes toutes les deux.

Je reviens vers « la foire » (beaucoup disent « la foire » au lieu de Salon du livre ou Palais des expositions). Le K-Way bleu que je porte introduit de la confusion chez certains qui le prennent pour un costume officiel d’un agent non moins officiel, de sorte que plusieurs automobilistes ont ralenti à mon niveau, ouvrant leur vitre et demandant « le parking kho ? » et moi je jouais le jeu « au fond à droite », avec tout le sérieux nécessaire. Ou bien « C’est la foire de quoi cheikh ? « la foire des livres ». « Que des livres ? » « oui c’est la foire que des livres ». Et le gars d’accélérer en faisant la moue. Les personnes âgées me disaient « kho » (frère), les plus jeunes « cheikh », une seule personne m’a interpellé « si el hadj » (un jour peut-être). Il y a quelques années, (1998-2000 ?), j’habitais encore à Paris, j’avais subi la même expérience devant le Centre culturel Georges Pompidou (les grands tuyaux). J’attendais un ami, debout plus ou moins en faisant du surplace. De nombreuses personnes (une demie douzaine ?) sont venues me demander divers renseignements, me prenant pour un agent de garde de la grande Bibliothèque du Centre. Là aussi je portais une sorte de K. Way bleu, comme celui que je porte aujourd’hui (mais pas le même je vous rassure et il était plus épais).

L’heure avançait et l’affluence se développait. Les gens étaient de plus en plus nombreux assis sur les trottoirs. Rien n’a changé et j’en avais assez à cette heure-là, la onzième. J’en avais assez de tourner en rond. Je suis revenu à l’entrée principale. L’agent en faction a été catégorique « pas de badge pas d’entrée ». « Et le public qui attend ? » Il attend pour rien, l’entrée c’est demain » Il a ajouté « ou en fin de journée, vers 17 heures ». Il était 11h10 et j’en avais assez. Je suis rentré comme je suis venu. Après déjeuner, j’ai fait un tour à l’Institut français… puis suis rentré raconter ma journée aux Facebookers et à ceux qui me suive sur ahmedhanifi.com.

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Mon SILA au jour le jour : moins 1

LE TEXTE suit es photos

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LE REPERE

LIBRAIRIE DU TIERS MONDE

Le MAMA

L’ex librairie Charlot

Il pleut

VUE DE LA BAIE D’ALGER à partir de LA CASBAH

CENTRE DE FORMATION

LE MAMA

LE REPERE

UN SEUL HEROS…

LIBRAIRIE DU TIERS MONDE

METRO PLACE DES MARTYRS

LA BRASSERIE DES FACULTÉS

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Comme je l’ai fait par le passé (2014, 2015, 2016 etc.) je vous raconterai, en agrémentant mes textes de beaucoup de photos, « mon Salon du livre » au gré des jours, c’est-à-dire ce que j’ai vu, entendu, mes appréciations diverses etc. Il y aura donc pas mal de subjectivité. Je vous propose d’accepter cette vision des choses qui n’est pas (ne sera) peut-être pas la réalité objective telle que d’aucuns ou vous-mêmes le souhaiteriez. Elle est (sera) la mienne.

Nous sommes au soir du mercredi 23 mars 2022. Le temps est frais, mais il ne pleut plus sur Alger. La journée a pris des rides puis s’est évanouie. Les lumières fades de la ville (et d’ailleurs) ont remplacé la naturelle. La nuit est tombée et avec elle les couleurs se sont transformées, se sont éteintes ici, se sont faites discrètes là. Les bruits (infernaux) font les 2X8+8. La soirée est en mode troisième 8, c’est-à-dire repos, mais des passants braillent toutefois de temps en temps. Là (21h10) j’entends quelqu’un hurler et hurler encore « ya zizou !! ya zizou !! » Et il recommence. Son camarade (très certainement) se met à siffler. Je ferme les persiennes et la fenêtre de la chambre d’hôtel.

Dans la journée, les hauteurs d’Alger offraient de très belles vues sur la Méditerranée, mais le beau et célèbre café- restaurant de la haute Casbah, « Le Repère » est fermé ainsi que la mosquée Sidi Abdellah à côté.  Le peuple rêve d’être un jour « le seul héros » et nous le fait savoir en ‘graffitant’ le mur. J’ai dévalé les rues du quartier (plus vite que je ne les ai grimpées). Je suis descendu jusqu’au marché Randon, place des Martyrs en passant par l’Office d’enseignement et de formation à distance (ONEFD) . Il pleuvait beaucoup alors, comme je n’avais pas de parapluie, je me suis engouffré dans le métro.

À l’entrée de la Librairie du Tiers Monde des affiches publicitaires sur « Fehla » de Rabeh Sbaa que je salue (lundi dernier à Oran, nous avions pris un verre ensemble ainsi que notre ami commun Lakhdar A. qui lui, a écrit « Formation de formateurs, manuel opératoire d’un formateur ») et sur « Chroniques littéraires » de C. Chaulet-Achour… J’apprécie beaucoup Madame C.C.A. Un jour (il y a longtemps, à Paris) elle m’avait affirmé que l’une de ses étudiantes en lettres de Cergy Pontoise, une suédo-algérienne, « qui possède des bribes de trajectoires de votre personnage » avait choisi mon roman « Le Temps d’un aller simple » pour y travailler. Je n’ai jamais lu/vu trace nulle part de cette thèse. 

Je suis passé devant le MAMA (loin, très très loin du MoMA de New York, cela va sans dire) qui fait pitié. J’ai traîné du côté de l’ex rue Charras. La librairie de Monsieur Charlot, l’ami et premier éditeur d’Albert Camus, est à l’image du MAMA, puis je suis allé du côté de la faculté et de la Grande Brasserie qui porte son nom, belle mais empestée de fumée de cigarettes que j’ai, n’ayant pas trop le choix, supportée malgré tout. Des jeunes hommes et des jeunes femmes (4 pour les premiers, 3 pour les secondes) discutaient serrés autour de chopes (pour les uns) et de rien (pour les autres). Leurs voix se faisaient volontairement hautes. Ils faisaient « journalistes » ou sont-ils étudiants (la fac est à six mètres, de l’autre côté du trottoir de Didouche Mourad). Ils discutaient du monde comme il va, les guerres, ceci, cela. L’un d’eux était volubile et parlait plus haut que les autres ; stylo, feuille et gestes larges faisant vaciller son verre. Un futur leader ? Ces jeunes m’ont plongé dans mon propre passé à Oran. Nous aussi (à leur âge) – mes amis d’alors que je ne nommerai pas ici et moi – nous discutions sans fin et faisions et défaisions le monde au mythique Majestic (place des Victoires) dans les années 70 (avant l’appel du grand Nord) en fumant, buvant, gesticulant à voix haute (je le disais il y a deux secondes). À voix haute pour que nos messages soient bien entendus n’est-ce pas ? Ou nos ego (nos différents moi). Nous étions désignés par les uns et les autres comme « les anars » (versus les « cocos », les Stals quoi, que nous exécrions, apôtres de Boum). Mais cette histoire est lointaine, laissons-la au repos qu’elle mérite.

J’ai omis les journaux. Ils ont titré à la veille du très attendu Salon comme s’il s’agissait de films du grand West : « Sila post-Covid : le défi du papier » (El Watan), « Après deux ans d’absence le Sila revient cette semaine ; À lire libre » (Liberté), « Retour après deux ans d’absence du Sila » (Le Quotidien d’Oran). Ils consacrent tous à l’événement plusieurs colonnes en pages intérieures.  Demain en effet, tel ou tel ponte inaugurera en grandes pompes le 25° Salon International du Livre d’Alger. J’en dirai un mot chaque jour jusqu’à mon départ, l’avant-veille de sa fermeture hélas.