Article à propos de « L’Arabe dans…. », lire cet article de Ali CHIBANI in La Plume francophone.
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Adieu Suzanne
C’était en 1973. J’avais l’âge de toutes les folies et même deux ans de plus. Et le diable au corps. Je me trouvais dans un pays lointain, aujourd’hui à deux clics de souris, à deux doigts donc. Mais à l’époque, ce pays qui nous faisait rêver était pour nous – nous la bande ‘Snouci and C°’ du quartier Michelet d’Oran –bande à laquelle s’est jointe Suzanne L. fraîche émoulue de La Sorbonne, enseignante à la fac de Lettres d’Oran Sénia – le bout du monde. Ce pays est la Suède. Je me trouvais en Suède donc et plus exactement à moitié allongé sur un sofa blanc dans un grand appartement de Farsta. Farsta est un joli bourg dans le sud de Stockholm. J’étais plus ou moins allongé avec dans la main une cannette de je ne sais plus trop quoi. Il me reste dans mes souvenirs qu’elle était sacrément énergisante. Dans la pile de vinyles j’avais choisi un morceau très en vogue, « Suzanne takes you down to her place near the river/ You can hear the boats go by/ You can spend the night beside her/ And you know that she’s half crazy… »
Dans l’appartement, qui était très spacieux, vivait une demi-douzaine de personnes, toutes – je le saurais plus tard – aussi sympathiques et farfelues que déglinguées. C’était Suzana, une fille que j’avais connue à Paris qui m’y avait invité. Nous avions fait le trajet ensemble en stop de la Porte de Clichy à Stockholm. Trois jours. Ce jour-là, un samedi, je m’en souviens bien car Suzana m’avait proposé d’aller voir ensemble Viskningar och rop de Bergman, à son retour. Elle était partie voir sa mère je ne sais plus où. Les autres co-locataires étaient eux aussi absents. « But that’s why you want to be there/ And she feeds you tea and oranges/ That come all the way from China/ And just when you mean to tell her/ That you have no love to give her » Les Suzanne m’envoutaient. De sa voix profonde Cohen nous embarquait auprès de lui, il nous invitait aux voyages les yeux fermés en toute confiance.
J’étais plus ou moins allongé en sirotant mon jus de je ne sais plus quoi, lorsque j’entendis un bruit de clé dans une serrure. Le temps de me retourner, un mec était planté là, un pack de Carlsberg V dans les bras. Il était bien éméché. Et même plus qu’éméché. Je me suis levé comme un soldat, prêt à se mettre au garde-à-vous. Que faire d’autre à 22 ans ? « Hi » j’ai dit en tendant la main, peu rassuré. Le gars m’a regardé un moment. N’a pas répondu à la main tendue. Il s’est affalé sur un fauteuil, puis a posé avec délicatesse le pack de bière sur une table basse. « U come here with Suzana, is n’t man ? » Et l’autre là-bas sur le tourne-disque qui se fichait de la situation et qui chantait encore « Then she gets you on her wavelength/ And she lets the river answer/ That you’ve always been her lover ». J’ai dit « Suzana, heu, yes, yes… » Je ne savais quoi dire en fait, car le type ne m’inspirait pas confiance. Le visage déformé il a baragouiné je ne sais quoi, a porté son bras droit dans la poche arrière de son pantalon pour en extraire un objet noir qu’il a tendu vers moi. « Cohen se fiche de moi » ai-je pensé. Il n’arrêtait pas. « And she shows you where to look/ Among the garbage and the flowers/ There are heroes in the seaweed/ There are children in the morning/ They are leaning out for love/ And they will lean that way forever/ While Suzanne holds the mirror » « This is for you guy » cracha le voyou. Le « this » signifiait l’objet qu’il tenait fermement dans la main. Et il disait qu’il me le destinait. Je n’avais pas trop vite saisi. Était-ce une plaisanterie ? Le gars ne souriait pas. Son regard, sa bouche, son visage, exprimaient plutôt de la colère. Je compris au terme d’un moment qui me parut une éternité que décidément non, le malfrat ne rigolait vraiment pas. Mais alors pas du tout. J’ai tenté d’entamer une discussion avec lui. Sur le bout des doigts ou des pieds. Plutôt des pieds.
Le type était occupé à dégoupiller une Carlsberg, il cherchait dans sa poche avec sa main libre un instrument pour. L’autre main tenait fermement un révolver. Le moment était propice. J’ai réussi à m’extraire de la nasse qu’était devenu l’appartement, j’ai dévalé je ne sais comment les trois étages de l’immeuble, traversé la cour, suis sorti dans l’avenue, ai couru, couru, couru, sans me retourner jusque dans Djurgarden, un grand parc où se promenaient des centaines de personnes au sein desquelles je me suis fondu. Et j’entendais au loin Suzanne, « And you want to travel with her/ And you want to travel blind/ And you know that you can trust her/ For she’s touched your perfect body with her mind. » Je ne voulais rien d’autre que « voyager avec elle… voyager les yeux fermés » Je savais que je pouvais lui faire confiance… »
Le soir, lorsque la nuit se fut bien installée, Suzana me raconta l’histoire de ce type « il est un peu dérangé, il n’est pas méchant, non, il dit toujours qu’il va tuer quelqu’un. He always says that ! ». C’était en 1973. J’avais l’âge de toutes les folies et même plus.
Leonard Cohen est mort, mais pas Suzanne. Aucune des trois. La suédoise est grand-mère, l’égérie d’Oran a retrouvé Paris et Suzanne l’éternelle est en nous tous. Elle sont toutes plus vivantes que jamais. Je les entends encore, quarante ans plus tard et quelques rides, me fredonner notre air préféré, « And you want to travel with her/ And you want to travel blind … »
Si vous souhaitez rencontrer Suzanne, l’écouter, c’est simple. Cliquez ici :
Oran, samedi 12 novembre 2016
NB : Léonard Cohen est mort il y a cinq jours, ce lundi 7 novembre à Los Angeles. Il avait 82 ans
Cliquer ici pour lire et écouter Suzanne (2 vidéos). Et voir Suzana
Débâcles- Éditions Incipit en W – Miramas, 11, 2016
C
À la mémoire de Bendjelida Senouci
« Si mois avec la lune et jours avec le soleil cheminent dans l’éternité, alors les années qui passent sont comme un voyageur. Celui qui va à la rencontre de la vieillesse en faisant flotter sa vie sur une barque, en tirant le mors d’un cheval, fait de chaque jour un voyage, il fait du voyage sa demeure. » Bashô
Les cigales
Elles arrivent par grappes entières,
Une et deux et trois…
Libérées enfin de l’obscurité.
Elles enchanteront le monde des ciels d’azur
Et des mers laiteuses,
Le temps d’une saison
D’une vie,
En se gavant de la sève
Des oliviers de Mare Nostrum,
Surtout pas de mouches ni de vermisseaux.
Elles sont les cigales.
J’en ai entendu quelques-unes ce matin.
Félicité et plaisir nous invitent à l’indulgence.
*
Embryon
D’un seul trait, elle m’a fendu comme un dard
Ou en quelques secondes chrono.
Une lave ai-je pensé, abattu.
Liquide, mais acérée comme l’éperon du cheval
Elle s’est répandue dans mon être, ardente,
Usinant ma résistance, s’en souciant comme d’un fétu.
Rage et désespoir ma fille devant ce fleuve de douleurs.
Stérile bourgeon, si loin de la vie.
*
Nouvel An
Mille myriades d’étincelles éblouiront les cœurs au Soir venu
Chaque point cardinal de chaque rose des vents
Pétillera de ses mille feux à fatiguer des heures durant la nuit ténue
Qui ira le cœur joyeux s’éteindre de nouveau devant l’Astre levant
Bénis soient ceux dont la génuflexion exalte notre humilité.
*
Napoli
Napoli, disent-ils.
Je ne te vois pas
Ne te crois pas
Tu n’es qu’abstraction à l’horizon
Le terme du voyage.
Napoli, disent-ils
Je te devine là-bas
Mon cœur est serré, mais serein
Impitoyable temps
Qui émonde mon chemin
L’abrège.
Napoli, disent-ils.
Rassurée par la faux
Qui tremble en toi
S’impatiente,
Tu souris.
Napoli, disent-ils
Me voilà à Mori
Sans épitaphe,
Glacé d’éternité
Au pied d’un cyprès
À la porte du Ciel.
Ilawiir.
*
L’homme qui marche
Entre les nervures des frêles feuilles
De mon éphéméride,
L’onctueuse encre
De ma conscience
A tracé des signes
Verdâtres, blets ou irisés
Que le granulaire miroir
De ma mémoire
A depuis longtemps invalidés.
Traces puériles, stériles, vaines
Qu’une tempête de sable ou d’humeur
Un jour, une nuit,
Dispersera hors du temps.
Poussière.
*
Ceux de Mimoun
Des rideaux de sable chaloupent en ce matin finissant
Dans le ciel de la ville qu’ils colorent.
La ville de ceux des croyants, de Mimoun l’ancêtre
Dernier aïeul de Tadmaït et de Tazegart
De Tahataït et d’Aghlad.
Dans un même élan
Les corps et les esprits seront bientôt
Gagnés par l’inertie
Et l’assourdissant silence du verbe.
Trente-cinq à l’ombre des palmiers.
Au loin, dans un effort ailé
Les derniers Traquets se retireront.
Là-bas, la rose des sables et les dunes,
Dunes et dunes encore figurant
Bien après les foggaras, la Palmeraie,
Bien après la blanche Sebkha
Là-bas à l’horizon
La rose des sables et le Grand Erg éternel,
Veillent.
Ils seront, le soir venu, appelés à la rescousse
Par le chant reconnaissant d’Ahellil
Jamal Ahellil
Ceux de Mimoun
Écrasés par le mutisme des mémoires
En colère pourtant.
Épaule contre épaule,
Lemserreh et Taguerabt,
Bengri et Tamja.
Et les qarqabous, les qarqabous.
Ici des maisons de crépis rouge carmin
Et des lauriers roses hors d’eau,
Sont cernés par le Chergui, le sable ou le néant.
En contrebas de la Hamada
De Tin-Ziri à At-Saïd
Les jardins résistent.
À l’ombre de la tonnelle de roseaux blêmes,
Croisés aux branches desséchées des palmiers,
Les thés rouges attendent que leur destin
Les libère des verres insensibles qui mal les étreignent.
Comme hier et comme demain,
À Aghlad et à Ighzer,
À Timimoun.
*
Bou-Sfer
Odeur marine,
Tapis d’algues et de mousse
Sur les récifs.
Éclats de lumières
Jardins de Keukenhof
Mosquée de Mara e Sharif
Et toiles gauguines réunis.
Rouge, vert, bleu, violet du spectre
Brume sous le soleil
Savez-vous…
L’île de Paloma à dix lieues
Paonne au milieu des eaux hésitantes,
Dans le silence de ses cuisines, Martinez est englué.
Veille de premier mai.
Flonflons et slogans de la syndicale
Un air vicié du passé frémit un instant.
Chaluts, etc.
Le saviez-vous ?
Courses aux anchois, bonites, calamars,
Dorades et espadons.
Le frisson
Du grand poisson de Heredia
Échappe à la nasse du comptable
Qui tremble ‘‘combien, combien ?’’
Une vedette traverse le cadre de la véranda
Ou la fenêtre ouverte de Moderato cantabile.
Le bruit de son moteur
Emporte le chant et les ailes déployées
D’un goéland argenté.
Le soleil a dissipé la brume
Les récifs émergent enfin.
De cette terre-là je suis,
Vous le savez.
*
Galerie
Ils tournent en rond
Brassent de l’air
Bousculent leurs semblables
S’étouffent, suffoquent
Dans la galerie.
Ils font fi des règles
Élémentaires
Feux tricolores.
Machines à tuer
Karsan ou Coaster
Tous les sens uniques
Mènent où tu veux
À Rome, à la bourse ou au ciel
Loi du plus fort, du plus rusé,
Pas même de la jungle.
Vulgarité.
Capharnaüm.
Ils courent,
Montres de chez Kitsch au poignet
Mauvais goût et obscénité encore
Brasser du vent toujours
Intimider ses frères.
Et ils courent, courent.
Recherchent la boussole, la banque
Où l’asile
Dans la galerie.
‘‘Time is money’’
Abriter ses neurones aux pieds
Du bazar.
Temps irrespirable
Et monnaie de singe.
Contre mon silence, mes ritournelles,
Ils me promettent le paradis
Sous les tapis contrefaits de Taïwan
Ou de l’autre Orient
Dans la galerie, songerie.
Sous le ciel généreux
Les cœurs sont démontés
C’est Aladin et Disneyland
À mille lieues de Hikmet
D’Aïtmatov ou de Ben-Karriou,
De Gibran ou de Qabbani.
Ils ont défiguré, violé ma galerie.
Transformer ma songerie
Est leur horizon
Le i qu’ils planteront après l’s de ma songerie
Ne sera pas de Queneau.
Il achèvera ma Galerie, ma songerie,
Dans l’oued asséché de Rob’ el Khali.
*
Débâcle
Bien assis sans nulle façon,
Serrés, rêvassant de combines
Sur la balustrade ils affinent
Leurs décisions les six garçons.
Vers la Montagne des lions*
Leurs familles font triste mine
De la plage de Aïn Franine
Ils iront sans bénédiction
Se glisser dans l’embarcation
La tête pleine d’Argentines
Avec le soleil qui décline
Le regard fixant l’horizon
Harraga est leur nouveau nom
Et la mer de glace assassine
Les engloutira sous nos ruines
Les écrans du monde offriront
Six larmes à leur disparition
Six larmes à leurs tombes marines
Lucarnes de croco chagrines
Miroirs de tous les abandons.
* Montagne des lions : montagne à l’est d’Oran
Aïn Franine : village côtier en contrebas de la montagne des lions.
Harraga : « brûleurs » de frontières. Clandestins ou sans-papiers en devenir.
*
Le voyageur de Caspar
Sous le rocher, à tes pieds,
Le temps a posé
Au-delà de l’océan du possible,
La voie dont tu n’emprunteras
Que des débris.
Où vas-tu ?
Plaines et montagnes,
À l’infini lactescent du ciel,
S’amalgament
Depuis la première nuit.
D’où viens-tu ?
Nul ne te le demande.
Fruit de tribulations cosmiques,
Peut-être.
L’inconnue ne comblera pas ton impatience.
Elle te happera au vol
À l’heure qu’elle jugera venue,
Au sommet de ton faîte
Ou dans la vague.
Qu’es-tu ?
*
Leurre
Dans les labyrinthes d’immeubles
Bariolés
Une multitude d’existences
Et autant d’abandons
‘‘Notre métier c’est d’aider les entreprises
à vendre leurs produits…
À chaque palier
De ce désert vertical
Des espoirs s’accrochent,
…Or pour qu’un message publicitaire soit perçu,
il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible…
Silencieux
Au bouillonnement univoque
Des écrans plats.
…Le rendre disponible, le divertir, le détendre
pour le préparer entre deux messages…
Si elles avaient la certitude
Ferme
Qu’ils n’étaient pas qu’une ombre insensible,
…Ce que nous vendons aux entreprises, c’est du temps de cerveau humain disponible…
Mais rien n’est plus difficile que d’obtenir cette disponibilité.’’
Si elles avaient la certitude
Ferme
Qu’ils n’étaient pas qu’un leurre,
Un trompe-l’œil impénétrable,
Les solitudes les éventreraient
Pour mettre bas l’Autre.
*
Apothème
Entre le murmure des mots et la rumeur de
La mer, l’ancien enfant des deux
Montagnes-phares, trace
Des suppliques qu’il adressera aux
Lions de la ville
Et au mausolée de
Santa Cruz au terme de la dernière aube :
Érigez à la source blanche, sur
Ma terre,
Demeure des aïeux, la géographie de mon
Éternelle épitaphe.
*
Trop-plein
Suspendus aux exigences de mes semblables,
Les tourments et les joies qui m’assiègent,
Embellissent ou déforment
Le profil des mots qu’ils conquièrent
Pour les libérer afin qu’eux-mêmes
M’affranchissent du trop-plein
De vacuité ou d’excès,
L’une et l’autre en équilibre
Sur le triangle d’un fil ténu
Tendu entre le bord de ma mémoire rétive,
L’abîme et la cime du monde.
*
L’automne déjà ?
Désormais mon soleil rafraîchit son visage à l’eau de mer. Qu’il est loin le chant du coq…celui-là même qui m’a ouvert au monde et m’y a mis. Les saisons dansaient autour de mes insouciances, et mes rêves insensés froissaient les cloisons jusqu’aux plus sophistiquées. ‘‘Larguez les amarres !’’ s’exclamaient les marins des mers et des océans aux hommes arrimés à leurs certitudes, servitudes. À leurs misères.
Je les ai bien écoutés et le moment propice un jour, alors que le printemps de nouveau parsemait ses robes versicolores et emplissait nos îlots de ses effluves enivrants, j’ai attendu que l’obscurité s’installe pour envelopper l’amertume, le conformisme et tous les ismes et umes à ma portée – ils ont longtemps brûlé le sel de mon corps à mon corps défendant – dans un manteau que j’ai mis en bière et jeté par-dessus bord, pas comme une bouteille qui dit autre chose, qui crie ‘‘j’arrive !’’ mais pour m’en délester définitivement. J’avais vingt ans, mon éternité tenaillait tous les enfers. La veille j’avais craché sur les poids et mesures de la Balance et toutes les lâchetés. Adieu aussi aux amitiés asséchées, décharnées ! ‘‘A nous deux liberté !’’
Il fallut manœuvrer et s’armer de patience. Voilà que l’horizon n’était plus qu’une ligne du large, dépassée. L’envers de l’enfer n’était pas l’endroit du paradis. Que de couleuvres avais-je eu à avaler ! Dans les berges d’Amsterdam, des matelots ivres et des femmes-accordéons m’ont lancé des frites belges et j’ai fermé les yeux. Dans mon dos innocent, des index tapageurs pointaient mon intrusion. Avaler des danses et des boas, n’est-ce pas le lot de notre humanité ?
Plus tard, dans d’autres contrées où l’atmosphère se parait de bienveillance, j’ai frôlé la fierté de montagnes souvent inaccessibles. Au pied de l’astre bleu des beaux jours, j’ai fait des rencontres inattendues. J’ai déambulé dans les banlieues de la vie à la recherche d’audaces à assouvir et une langue pour m’y noyer corps et plume. Des danses il y en eut d’autres, de toutes sortes, jusqu’à la torride Turku, jusqu’aux aurores boréales. Aux quatre points cardinaux, sans crier gare, les clepsydres se chargeaient d’écouler les émois du monde en perpétuel équilibre incertain. Ils s’écoulèrent et s’écrouleront, percés par la Flèche.
Les souvenirs paralysent ma mémoire dans leur inévitable conversion.
L’aurore que j’avais longtemps soumise à mes caprices ne m’a pas toujours été fidèle non plus. Aujourd’hui le ciel se couvre un peu plus. Des orages obscurs s’amoncellent alentour sur les aubes et les hommes de ma génération. Mon soleil se farde de rouge et le questionnement aporétique égrène prestement les saisons qui ne cessent de virevolter dans un monde engoncé dans une profonde dépravation. N’est-ce pas déjà l’annonce du seuil d’un intime et banal automne ?
*
Ligne d’arrivée
Les rais du jour peu à peu s’évanouissent
Dans le soir qui se déploie.
L’ombre absorbe la lumière
Qui l’ensorcellera de la même manière
Le moment recommencé.
Les tics et les tacs sont épuisés
Les aiguilles ont le tournis
Fatiguées de battre la mesure
Et la pendule s’impatiente.
Le cœur est en peine
Frissonne et s’interroge
Franchir la ligne d’arrivée
Une porte qui s’ouvre ou une interrogation réitérée
Qui tombe et file à la traîne des mystérieuses étoiles dans le ciel
Dans l’indifférente palpitation de la nuit.
_______ Lire 2° partie in « Aubuscule »_______
Les cigales : Miramas, juin 2014
Embryon : Fos-sur-Mer, décembre 2014
Nouvel An : Marseille, décembre 2014
Napoli : Miramas, janvier 2015
L’homme qui marche : Provence, février 2015
Ceux de Mimoun : Timimoun, avril 2015
Bou-Sfer : Bou-Sfer, avril 2015
Galerie : Oran, avril 2015.
Débâcle : Oran, avril 2015
Le voyageur de Caspar : Provence, mai 2015
Leurre : Provence, mai 2015
Apothème : Provence, juin 2015
Trop-plein : Provence, juin 2015
L’automne déjà ? : Miramas, juillet 2015
Ligne d’arrivée : Alger Agha, novembre 2015