Proclamation du 1° novembre 1954

________________________ LE DECLENCHEMENT PROPREMENT DIT___________________

« LES 9 » DE NOVEMBRE 1954

« Le Comité révolutionnaire d’unité et d’action (C.R.U.A.), qui déclencha la rébellion armée, a été fondé à Alger en mars 1954 par neuf anciens membres de l’Organisation spéciale (O.S.) du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (M.T.L.D.), dont le président était Messali Hadj ; ces neuf hommes, devenus les  » chefs historiques de la révolution algérienne « , sont MM. Ben Boulaïd, Didouche et Ben M’Hidi, depuis décédés ; Boudiaf, Bitat et Belkacem Krim, alors restés en Algérie ; Khider, Aït Ahmed et Benbella, réfugiés au Caire. »

(Le Monde, 20 mars 1962).

Sur les 9 membres, six ont été pris ensemble en photo. Les 3 autres ne pouvaient pas, car se trouvant en Égypte.

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lepoint.fr

Que sont devenus les neuf fondateurs de l’Algérie moderne ?

Par Emmanuel Berretta

Publié le 13/03/2012 

Ils sont neuf, en 1954, à lancer la résistance algérienne. Des destins tragiques. Pour eux, l’Algérie indépendante a été une histoire triste.

C’est le CRUA (créé en mars 1954) qui décide du déclenchement de la guerre d’indépendance. Les 6 que l’on voit sur cette photo plus Ben Bella Aït-Ahmed et 

En mars 1954, neuf hommes fondent le CRUA (Comité révolutionnaire d’unité et d’action). Ce mouvement déclenche la guerre d’indépendance algérienne. Neuf destins brisés par les évènements. Ils sont considérés comme les fondateurs de l’Algérie moderne. Cinquante ans après les accords d’Évian, que certains ne verront pas, le bilan est lourd : trois sont morts durant les combats, mais, plus triste, aucun des survivants du conflit n’a vraiment pu apprécier les bienfaits de l’indépendance suite aux divisions qui les ont séparés.

Commençons le récit par ceux qui ont été abattus par les Français. Le premier à tomber est Mourad Didouche, surnommé Si Abdelkader. Ce fils de Kabylie tombe à l’âge de 27 ans lors de la bataille du douar Souadek, près de Constantine. C’est un ancien cheminot, militant CGT, fondateur d’un mouvement scout. L’une des principales artères d’Alger porte aujourd’hui son nom (ex-rue Michelet). Dans cette mort précoce, il est rejoint par deux compagnons : Mostefa Ben Boulaïd et Larbi Ben M’hidi. Le premier décède en 1956, à 39 ans, dans le maquis. Il avait combattu sous l’uniforme français durant la Seconde Guerre mondiale. Il est décoré de la Croix de guerre et participe à la campagne d’Italie. Les circonstances de sa mort sont rapportées ainsi : il serait décédé suite à la détonation d’un poste de radio piégé par les parachutistes français.

Larbi Ben M’hidi, lui, décède en 1957 à l’âge de 34 ans. Issu d’une famille rurale des Aurès, Ben M’hidi s’engage dans les scouts musulmans. Comptable dans le génie civil, son engagement politique est marqué par sa perception des massacres de Sétif en mai 1945. Il est arrêté en février 1957. Torturé, il refuse de livrer ses camarades. Le général Aussaresses finit par reconnaître, en 2007, qu’il l’a fait pendre, sans procès préalable.

Ben Bella sème la discorde

Ils ne sont donc plus que six en vie au moment où l’Algérie accède à l’indépendance en 1962. Des neuf, Ahmed Ben Bella prend le pouvoir en devenant le premier président de la République algérienne démocratique et populaire. Il a alors 46 ans. Cet ancien joueur de l’Olympique de Marseille a combattu aux côtés de la France durant la Seconde Guerre mondiale sous les ordres du général Juin puis de Lattre. Il est finalement décoré par de Gaulle de la médaille militaire. Une fois à la tête de l’État algérien, sa propension à cumuler tous les pouvoirs provoque son renversement par un coup d’État militaire, conduit par son dauphin, le colonel Boumediene, en juin 1965. Il connaît alors la prison jusqu’en juillet 1979, puis l’assignation à résidence et finalement l’exil en Suisse à partir de 1981.

Pour accéder au pouvoir, Ben Bella aura écarté, auparavant, ses rivaux parmi les fondateurs du CRUA. À commencer par Krim Belkacem, surnommé le « Lion du Djebel ». Lui aussi a connu l’engagement militaire sous le drapeau français. Il sort du conflit de 39-45 caporal-chef. Des qualités qu’il mettra au service de la cause algérienne. Il parvient au fait de sa puissance lorsque se forme le gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Il signe les accords d’Évian. Mais les partisans de Ben Bella l’isolent en juillet 1962. Il prend lui aussi la route de l’exil. Le régime de Boumediene l’accuse d’avoir fomenté un attentat en avril 1967. Il est condamné à mort par contumace. Le 18 octobre 1970, le Lion du Djebel est retrouvé étranglé par sa cravate dans une chambre d’hôtel de Francfort, en Allemagne. Il allait avoir 48 ans. Réhabilité en 1984, sa dépouille rejoint le cimetière d’el Alia, à Alger, dans « le carré des martyres ».

Élimination physique des opposants

Mohamed Khider, originaire d’une famille modeste de Biskra, est assassiné en Espagne en 1967. Il avait été, lui aussi, contraint à l’exil après avoir eu des divergences avec Ben Bella. Un exil en Suisse, puis à Madrid. Le 4 janvier 1967, la police politique du régime de Boumediene lui envoie un ou plusieurs tueurs. Mohamed Khider était accusé, par Ben Bella puis par Boumediene, d’avoir détourné le trésor du FLN qu’il gérait en tant que secrétaire général du parti.

Mohamed Boudiaf figurait parmi les fondateurs. Cet adjudant dans l’armée française s’engage dans la cause nationaliste après les massacres de Sétif en 1945. Opposé à Ben Bella – dont le régime l’avait condamné à mort en 1964 -, puis à tous les présidents qui ont suivi, son exil va durer 28 ans. Quand les militaires le rappellent en 1992, l’Algérie est en crise. Il apparaît comme un « homme neuf ». Il annonce vouloir lutter contre la corruption. Il est abattu, en public, cinq mois plus tard, lors d’une conférence des cadres dans la ville d’Annaba. L’auteur du meurtre, Lambarek Boumaarafi, est toujours en prison. Ses motivations n’ont pas été clairement établies…

L’indépendance, puis l’exil

Exil également pour Hocine Aït Ahmed. Engagé dans la lutte pour l’indépendance dès l’âge de 16 ans, il dénonce le tournant autoritaire de la Constitution de l’Algérie indépendante. En créant le Front des forces socialistes en 1963, il brise la logique du parti unique. Arrêté en octobre 1964, il est condamné à mort, puis gracié. Il s’évade de prison le 1er mai 1966 et se réfugie en Suisse. Aujourd’hui encore, à l’âge de 85 ans, il s’active dans la vie politique algérienne pour faire avancer ses idées.

Le dernier membre de cette histoire, Rabah Bitat, est décédé à Paris, à l’hôpital Broussais, en avril 2000, à l’âge de 74 ans. Il démissionne de ses fonctions auprès de Ben Bella en novembre 1963 pour rejoindre l’opposition à Paris. Quand Boumediene renverse Ben Bella, il rejoint le nouveau régime et y fera toute sa carrière en conservant, notamment, le ministère des Transports de 1970 à 1977. À la mort de Boumediene, il assure un intérim de 45 jours. En 1990, en désaccord avec le président Chadli Bendjedid, il démissionne de l’Assemblée nationale et se retire de la vie politique. Partisan de Bouteflika, il retrouve un rôle public quand celui-ci remporte la présidentielle de 1999 avec 90,24 % des suffrages exprimés.

En définitive, sur le groupe des neuf, on compte deux survivants : Ben Bella et Aït Ahmed. Trois ont été assassinés par l’armée française. Trois autres par des concitoyens algériens. Un seul est décédé de mort naturelle. L’Algérie, une histoire amère de l’indépendance pour les fondateurs.

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