De Marseille à Tuktoyaktuk

De Marseille à Tuktoyaktuk- [10/30] : 

Avant la fin de la rencontre, Ange téléphone à l’agence de location de Whitehorse. Elle se renseigne sur les prix et les disponibilités des véhicules. Quelques minutes lui suffisent pour conclure, avec l’accord de Véro et Omar, la réservation d’un monospace pour la période allant du mercredi 20 au jeudi 28. « Vous êtes tranquilles maintenant », leur dit-elle. Ange Chaumont semble aussi contente de leur rendre service qu’ils sont eux-mêmes contents de rencontrer des gens aussi avenants. 

Vers midi, ils font des courses à Extra Foods un supermarché que leur suggéra Victor. Puis reviennent à la maison pour déjeuner. Omar propose de faire un grand tour avec le Kombi. Il dit vouloir mieux le connaître, en maîtriser la conduite. Sitôt soumise, l’idée est acceptée. Ils quittent le pavillon et prennent la vieille route de l’aéroport. Ils contournent la ville par le nord, empruntent la Frontier Trail, puis l’Ingraham Trail, la route qui passe devant la mine d’or Giant aujourd’hui désaffectée (fermée depuis 2005). À la fin des années quarante on a extrait de cette mine entre 200 et 250 kilos d’or. La vitesse maximum est de soixante kilomètres à l’heure. De nombreux panneaux invitent à la prudence. La vitesse est encore plus réduite sur certains tronçons de Yellowknife où il est interdit de rouler à plus de trente kilomètres à l’heure. La conduite du Volkswagen n’est par conséquent ni stressante ni même fatigante. Au cinquième kilomètre après la mine on peut soit continuer, soit prendre à droite. Si on poursuit l’Ingraham Trail, on arrive à Tibbit Lake à une centaine de kilomètres. Au-delà il n’y a que des routes de glaces qu’on ne peut utiliser qu’entre mars et décembre. Ces routes mènent au Nunavut. Si on prend à droite, ce que font Véro et Omar, au kilomètre quinze on arrive à Dettah, un village indien qui se trouve en face de Yellowknife, sur le bord du Grand Lac des Esclaves. Un grand panneau accueille le visiteur : « Welcome to Dettah Yellowknives Dene First Nation Territory ». Pour s’y rendre en hiver, il est préférable d’emprunter la route de glace qui traverse le lac Slave en un de ses bras au nord. La route de l’hiver est directe et plus rapide. Deux cents mètres en aval de la grande route, le bâtiment gouvernemental du chef Drygeese est fermé. C’est une sorte de pentagone construit sur deux niveaux auquel on accède par plusieurs escaliers et plusieurs portes vitrées. Sur la principale, un autocollant indique « please report to receptionist for assistance – Mahsi Cho » sur la seconde une pancarte signale « Closed ». Une quinzaine d’épaves de motoneiges, trois tipis, une peau d’ours semblent abandonnés sur un grand terrain vague. Dans le village engourdi, il n’y a rien d’intéressant. Hormis les gamins et le chien inuk fatigué qu’ils poursuivent, Dettah donne l’impression que pas une âme n’y vit ou que ses habitants sont reclus dans les maisons, ou qu’ils en sont absents. Plus loin, sur des monticules de gravier traînent des objets de toutes sortes : carcasses de vélo, caisses en métal et en bois, pneus… 

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(‘‘La suite au prochain numéro’’, le [11/30])

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